Edito
La première Balade des Sorbiers Rouges, sur les pas de Marcel-Henri Dubois, nous a guidés dans la Sarre, du 1er au 4 août 2024. Ce furent quatre jours passionnants pour notre délégation, à la découverte de la ville de Sarrebruck, du château, des églises et des musées, ainsi que du site sidérurgique de Völklinger Hütte, devenu Centre culturel classé au Patrimoine Mondial UNESCO.
La dramaturgie de notre séjour a été parfaite et palpitante, avec la découverte d’une bombe de 250 kilos, datant de la Deuxième Guerre Mondiale, se trouvant exactement dans notre périmètre ! La conscience et la mémoire du conflit et de la Shoah ont été présentes à notre esprit à chaque instant, et pour s’en rappeler, une stèle commémorative a gravé les paroles dont il faut se souvenir sans relâche : « Den opfern zum gedenken uns zur mahnung nie wieder faschismus. »
David et Jenny Jucker, La Chaux-de-Fonds
Christian et Lana Adam, Genève
Marcel Schiess, La Chaux-de-Fonds
(prolongée jusqu’au 15 septembre 2024)
Ce fut l’un des moments forts de notre séjour dans la Sarre. La découverte de l’exposition consacrée au cinéma allemand dans la salle historique des soufflantes – déjà un spectacle en soi – nous a tous stupéfiés ! L’exposition s’ouvre sur la section la plus spectaculaire : les années 1920-30, avec « L’Ange bleu » et Marlène Dietrich en majesté ! Les affiches et les films sur grand écran de Fritz Lang et de F.W Murnau ont gardé tout leur pouvoir de fascination. Et cela ne faisait que commencer !
En parcourant la grande salle, dans une scénographie qui mériterait un Oscar, nous parcourons 128 ans d’une cinématographie aussi riche que diverse, et qui traverse tous les grands événements de l’Histoire, dont la montée et l’avènement du national-socialisme, avec notamment les films de Leni Riefenstahl, toujours aussi vertigineux !
Dans cette cinématographie, figurent deux artistes nés à Sarrebruck : Max Ophüls (1902-1957), réalisateur du film allemand Liebelei en 1932, avant son départ de l’Allemagne pour la France, puis les États-Unis ; et Ingrid Caven, née le 4 août 1938 à Burbach, un quartier de Sarrebruck, où son père, mélomane, vendait des cigares. Sa maison n’existe plus, elle a été détruite par les bombardements alliés, qui ont rasé une grande partie de la ville de Sarrebruck. Ingrid Caven, actrice et chanteuse, épouse et partenaire de Rainer Werner Fassbinder, restera l’inoubliable Paloma dans le film de Daniel Schmid (1974), que l’on pourra revoir à la Cinémathèque de Lausanne, dès la fin août !
Informations très complètes sur l’exposition :
https://voelklinger-huette.org/fr/expositions/-/le-cinema-allemand-de-1895-a-nos-jours/382
Rétrospective Daniel Schmid à la Cinémathèque de Lausanne, du 29 août au 20 octobre 2024 :
Le samedi 3 août 2024, notre délégation s’est rendue au Musée historique de la Sarre, à Sarrebruck, pour la remise officielle du livre de Marcel-Henri Dubois A Sarrebruck tous les deux, à Madame Jessica Siebeneich, directrice adjointe et conservatrice du Musée. La cérémonie officielle – en allemand – a duré une vingtaine de minutes et s’est déroulée dans les sous-sols du Musée, dans la section consacrée à l’exposition permanente sur le Plébiscite de la Sarre du 13 janvier 1935. Ainsi, 90 ans plus tard, le récit de Marcel Dubois, paru en 1935 aux Éditions Oderbolz au Locle, revient à Sarrebruck et il entre dans la collection publique du Musée. Il apporte un témoignage inédit d’un observateur neutre, à la grande satisfaction de Jessica Siebeneich, qui va s’empresser de le traduire en allemand !
Musée historique de la Sarre : https://www.historisches-museum.org/startseite
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© Les Sorbiers Rouges, Marcel Schiess, 2024
Le Locle, le 16 mai 1946.
Madame Vve. Marcel Dubois
Le Prévoux
Madame,
La longue maladie dont souffrait M. Dubois, les nouvelles que nous en avions ces dernières semaines ne nous laissaient pas beaucoup d’espoir de le revoir au Collège.
Nous aimions cependant penser que le mal lui laisserait encore quelques moments d’accalmie.
Notre vœu n’a pas été exaucé et son décès laisse l’école, comme sa famille, plongée dans une profonde tristesse.
Au moment où il s’en va, la Commission scolaire et la Commission de l’école de commerce tiennent à vous dire combien elles ont apprécié M. Dubois. Il fut un excellent maître. Il connaissait parfaitement la langue allemande et savait l’enseigner. Cette tâche, si ardue parfois, il l’a toujours remplie avec dévouement, conscience et savoir-faire. De plus, il a su gagner l’affection de ses élèves dont beaucoup sont devenus dans la suite de bons amis pour lui. Brisé par la souffrance physique et le deuil, il a fait vaillamment son devoir jusqu’au bout, laissant ainsi un bel exemple à tout son entourage, à notre jeunesse en particulier.
Dans les heures difficiles que vous passez, les autorités scolaires vous expriment, ainsi qu’à toute votre famille, leur très vive sympathie et souhaitent que le bon souvenir que laisse votre cher défunt à toute notre population, la reconnaissance des autorités, des élèves, de leurs parents, vous soient de quelque réconfort dans votre deuil.
C’est dans ces sentiments que nous vous prions d’agréer, Madame, nos salutations respectueuses.
Au nom de la Commission Scolaire :
Le Secrétaire
M.H Primault
Signature lisible
Le Président
Signature autographe, pas lisible
Au nom de la Commission
De l’École de Commerce :
Le Président
Signature autographe, pas lisible
Marcel-Henri Dubois parlait, lisait et écrivait le patois du Jura neuchâtelois.
Il note dans son cahier « A bâtons rompus No 3, en 1931 :
« Ce patois du Locle et de la Sagne que ma génération ignore complètement »
Pour Marcel-H. Dubois, le foyer c’est l’hoteau, la maison de la famille Dubois au Prévoux, qui doit son nom à un terme de patois :
3o Aussi, par conséquent, c’est pourquoi: Il était très avare, «djierè, a sn’aterma è n’i avai quasi gnyon, on ne l’ammâve pas», aussi, à son enterrement, il n’y avait quasi personne, on ne l’aimait pas (N Ch. de F.). Le lieutenant de police voulait que tout fût rangé et «le z ètsirle foûran dzère apohyî…» contre l’hotau, les échelles furent donc appuyées contre la maison (N Bér. Pat. neuch. 117).
Université de Neuchâtel, dialectologie :
Le « patois » neuchâtelois est un dialecte de la langue francoprovençale, l’une des trois langues traditionnelles de l’espace gallo-roman, avec l’occitan dans le Sud, et le français (langue d’oïl, avec ses dialectes) au Nord. Neuchâtel se trouve à la limite nord-est du francoprovençal, qui comprend toute la Suisse romande (sauf le Jura), une partie du Jura français, le Lyonnais, le Forez, la Savoie et la Vallée d’Aoste (carte).
Comme tous les dialectes, le parler francoprovençal de Neuchâtel se distinguait légèrement d’un village, d’une vallée à l’autre, sans que cela pose de difficultés pour la compréhension mutuelle (carte).
Les derniers locuteurs du francoprovençal neuchâtelois ont malheureusement disparu dans les années 1920. Peu avant, conscient de sa disparition imminente, un groupe d’intellectuels et patoisants neuchâtelois a essayé de « sauver les meubles », en publiant un volume souvenir, contenant tous les textes en patois neuchâtelois qu’ils avaient pu rassembler. Ce volume a été publié à Neuchâtel en 1895; il se trouve dans toutes les bonnes bibliothèques du canton.
Ci-dessous, nous reproduisons le début d’un récit en patois de Boudry, rédigé par L. Favre, président du Comité du patois de la Société cantonale d’histoire et d’archéologie, avec sa traduction en français régional.
Voir le texte ment. : http://www5.unine.ch/dialectologie/NE_Presentation.html
Abram-Henri Dubois, né le 6 juillet 1858, l’état-civil indique le 26 juin, épouse Louise-Marie Simon-Vermot, née le 3 juin 1858, fille de Lucien, de Montlebon (Doubs, France), n’eurent point d’enfants, mais m’adoptèrent à la mort de mon père William, et furent mes parents, dont je vénère et bénis la mémoire tous les jours. Le numéro 73 de la Rue des Envers fut leur domicile de 1894 au 20 juillet 1930. Ma mère adoptive fut enterrée le jour de Noël 1918 (morte à 60 ans).
Celui que nous avons toujours appelé « Grand-Papa » par reconnaissance y fut veuf de 1918 à 1930, mais trouve à notre foyer et au contact de nos deux enfants des affections chaudes, un intérêt toujours en éveil. Dans mes « A bâtons rompus », j’ai essayé de faire revivre cette grande figure. Cher et bon Abram-Henri !
« Cet homme auquel je voue un véritable culte, une reconnaissance renouvelée à mesure que mes enfants grandissants attendent de moi davantage – l’enfant ne vivra pas de pain seulement…le cœur veut sa nourriture, l’esprit aussi.
Votre grand-papa ne m’a laissé manquer de rien, j’ai pris à son contact de grandes, de belles leçons d’énergie, de complaisance, de charité pratiquée sans parler, de dévouement, d’abnégation pour tous ceux qui avaient/auraient besoin d’aide.
Il aurait pu m’asseoir à l’établi, me faire quitter définitivement l’école. Il ne l’a pas fait.
Je suis bien certain que jamais pensée de lucre ne l’a effleuré à la croisée de « mes chemins ».Un grand cœur
Un caractèreUn homme aux réactions vives, promptes, trop rudes souvent (un ressort qui se détend soudain et vous saute à la figure). »
Note de Marcel Dubois : « 105 kilos à 70 ans ! »
Faire-part de la mort d’Abram-Henri Dubois : « Non pour être servi, mais pour servir »